« Lazare, viens dehors ! » Jésus s’écria (Jean 11, 43). Mais que signifie “être dehors” ?

Résumé de la conférence de Mgr Bruno-Marie DUFFE, Secrétaire du Dicastère pour le Service du Développement Humain Intégral lors de la Conférence Internationale de la FHA (28-11-2019)

 

Être dehors, c’est être “nu devant les autres”, c’est être “crucifié sur la croix des échecs et des désillusions”, c’est “faire l’expérience dans le grand vent de la méfiance…”, dit Mgr Duffé dans son intervention lors de la Conférence Internationale de la FHA.

Être dehors, c’est être aux grands vents des incertitudes, au froid et face à ses propres limites, à la merci de la pluie, du vent et de la faim, de l’inquiétude de savoir s’il est possible de trouver, dans ce monde, un peu de confiance.

Être dehors, c’est être dans la rue comme “lieu de l’anonymat et de la méconnaissance”.

Mais cet espace du “dehors” peut être aussi, et “de manière paradoxale”, l’espace d’une “rencontre inattendue et lumineuse”, un espace où se peut vivre une expérience spirituelle : Une “conversion spirituelle à l’accueil de l’autre”.

Cette “spiritualité de la rencontre avec nos frères et nos sœurs sans-abri” reposera, selon Mgr Duffé, sur trois ancrages majeurs : le regard, la présence et la Parole.

Cette expérience du Chemin, commence par le regard, un “regard posé et partagé”. Car le regard est la porte entre la vie physique et la vie spirituelle et la vie communautaire dans laquelle chacun est appelé par son nom. Être regardé, c’est être reconnu, nommé, considéré ; c’est une re-connaissance, c’est “être pour quelqu’un, dans la foule des humains”. C’est une expérience d’une sortie, d’une exode, qui nous permettra de vivre une rencontre en vérité.

Dans la rencontre nous nous découvrons pauvres et riches à la fois, nous découvrons que celui qui est dehors a un visage qui est beau et que la seule richesse est celle de l’échange.

Cet échange, ce dia-logos, cette sortie de soi commence grâce à la Parole car la vie spirituelle ─ sur les pas du Christ Serviteur et Messager ─, s’exprime avec les mots de notre condition humaine, des regards qui se croisent et des vies qui se dévoilent, dans leurs besoins d’humanité.

Or pour la plupart des personnes sans-abri, la rue est très souvent silencieuse. Ces personnes perdent la parole c’est-à-dire la capacité à participer à un échange dialogué. Leur rendre “la parole” c’est leur rendre la “dignité” qui fait de chacun de nous un sujet capable de recevoir et de donner.

En effet, il s’agit d’une présence : il s’agit d’être-là, présent pour l’autre, parfois dans le silence partagé où l’on se tient proche pour l’écouter. Parler c’est être là, c’est une présence.

Cet échange, dans la rue, avec les personnes sans-abri, nous engage “plus loin que là où nous avions prévu d’aller… La démarche caritative du pour l’autre devient alors la démarche fraternelle du avec toi”.

En se référant à l’Exhortation Apostolique du pape François, Gaudete et Exsultate (2018), sur l’appel à la sainteté dans le monde actuel, Mgr Duffé évoque trois ingrédients de toute “rencontre en vérité”:

  • l’humilité ou la douceur : un style “proposé par Jésus” et qui “passe par l’humilité”. Dans la Bible, doux et pauvres sont désignés par la même expression. Alors les plus humbles sont pour nous des maîtres. La spiritualité de la présence aux plus pauvres est une spiritualité de proximité en humilité et en douceur.
  • la ferveur (ou l’audace), celle-là consiste “à vivre ce que nous croyons profondément, dans une grande disponibilité à l’inspiration de l’Esprit et dans une grande écoute de l’autre”.
  • l’attention aux détails, et cela signifie : revenir aux choses simples de la vie quotidienne. C’est Jésus qui exhorte chacun de nous à prêter attention aux détails, aux petites choses qui concerne les autres et leur bonheur. C’est “la contemplation du visage du Christ dans la présence du frère ou de la sœur sans abri” qui “nous conduit à recevoir le Christ en cet autre que nous ne pouvons jamais réduire à ce qu’il est ou à ce qu’il est devenu”.

 

Et c’est ainsi que nous évangélisons et que nous nous laissons évangéliser par l’autre : lui et elles qui posent sur nous un regard qui nous relève ; lui et elle qui, dans l’instant de la reconnaissance, prononcent pour nous, la Parole qui nous appelle à sortir (de nos certitudes et de notre confort), à passer de la crainte à l’amour, de la mort à la vie.

Alors, allons dehors pour vivre l’aventure d’une Rencontre !

Denise EL KHOURY

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